Qu’est-ce que le rhum?
Le rhum est un spiritueux obtenu par distillation de mélasse ou de jus de canne à sucre. La mélasse, avec sa texture de sirop visqueux, est un sous-produit fermenté de la canne à sucre. C’est avec cet ingrédient qu’on produit ce qui est communément appelé le rhum industriel. Le jus de canne à sucre fermenté, aussi appelé vesou, sert quant à lui à la production du rhum agricole.
Le rhum peut être blanc, âgé ou épicé. Ses méthodes de vieillissement sont en grande partie similaires à celles utilisées pour le whisky, quoique le climat tropical des endroits où il est souvent produit accélère l’évaporation de l’alcool et de l’eau. Un rhum vieilli dans les tropiques profitera des effets du vieillissement en fûts de chêne quatre fois plus vite qu’un rhum vieilli dans un climat continental.
Le rhum est intimement lié aux différents héritages des peuples qui le produisent, ce qui en fait un produit identitaire aux histoires et aux cultures passionnantes.
Un peu d'histoire
La canne à sucre est une plante originaire de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Elle a été répandue par les Arabes, qui l’ont introduite depuis la Perse dans l’ensemble des territoires qu’ils ont colonisés, notamment à Chypre, en Crète et jusqu’en Espagne au cours du 8e siècle.
Il faut attendre 1493 pour que Christophe Colomb l’exporte en Amérique lors de son deuxième voyage, plus précisément sur l’île où se trouvent aujourd’hui Haïti et la République dominicaine. Colomb l’a par la suite implantée à Cuba au début du 16e siècle. Les Caraïbes deviennent dès lors des îles sucrières, et dès 1520, la canne à sucre s’étend partout en Amérique du Sud.
Au milieu du 16e siècle, alors que les colons espagnols se désintéressent du sucre au profit de l’or et du bois, Français et Anglais prennent le contrôle de son commerce dans les Caraïbes.
La première distillation de rhum dans les Caraïbes a lieu dans les plantations de canne à sucre au 17e siècle. Les esclaves des plantations découvrent que la mélasse, un sous-produit du processus de raffinage du sucre, peut être fermentée en alcool. La distillation de ces sous-produits alcooliques a permis de concentrer l’alcool et d’éliminer certaines impuretés, produisant ainsi les premiers rhums modernes.
Cependant, dans les années 1620, la production de rhum est également enregistrée au Brésil et de nombreux historiens pensent que le rhum, de même que la canne à sucre et ses méthodes de culture, a trouvé son chemin vers la Barbade.
À bord des navires de l’époque, le rhum, à qui on prêtait des vertus médicinales, était consommé par les pirates et les marins du Nouveau Monde qui avaient droit à des rations obligatoires.
Production
Il est très important de considérer que les méthodes de production du rhum diffèrent d’un terroir à l’autre, notamment durant les processus de fermentation et de distillation. On ne produit pas du rhum de la même manière en Jamaïque, à la Barbade ou en Haïti, et les différents artisans respectent tous des méthodes de production ancestrales qui datent de plusieurs siècles. C’est ce qui fait que tous ces rhums possèdent un caractère et une identité propres.
Pour le rhum traditionnel ou industriel, on transporte la mélasse dans des camions (ou via des canalisations quand il est produit à proximité d’une sucrerie). Pour le rhum agricole, la canne à sucre est récoltée avant sa floraison, à la main ou à la machine. On doit peser, contrôler, hacher et défibrer les cannes avant de les broyer pour en extraire le jus. Ce jus est alors filtré, puis fermenté dans des cuves. La mélasse ou le jus de canne est alors fermenté sous l’action de levures ajoutées pour obtenir une sorte de vin qui titre entre 4 et 5 % d’alcool. Ce vin sera ensuite distillé pour obtenir du rhum dont le taux d’alcool pointe à environ 55 %.
Le rhum peut être distillé dans des alambics à colonne, en continu ou à repasse. Cela dépend là encore de l’origine des producteurs.
En règle générale, le spiritueux est vieilli dans des fûts de chêne ayant contenu du bourbon. Certains producteurs utilisent cependant des méthodes propres au vin ou au scotch, comme l’affinage, l’assemblage ou encore le sistema solera, une méthode qui consiste à faire vieillir l’alcool par mélange fractionné, de manière que le produit fini mélange des alcools de différents âges.
Encadrement et législation
La définition du rhum n’est pas claire et varie selon qu’on se trouve en Europe, aux États-Unis, à Cuba, en Inde ou en Amérique du Sud. Cette confusion vient d’un paradoxe entre les règles locales de production et les règles imposées dans les grands marchés de consommation.
La Guadeloupe et la Martinique sont les seuls au monde à disposer d’une appellation d’origine contrôlée. L’ajout de sucre dans le rhum divise depuis plusieurs années les distillateurs européens et américains. En Guadeloupe et en Martinique, seul un ajout de 20 g de sucre est autorisé. Mais certains pays d’Amérique du Sud en rajoutent jusqu’à 100 g par bouteille. Cette pratique, jugée comme une concurrence déloyale, est dénoncée par la profession.
Depuis mai 2021, une nouvelle réglementation européenne clarifie les étiquettes pour le consommateur et soumet les producteurs à des réglementations plus strictes. Au-delà de 20 g de sucre ajouté, la boisson ne peut plus être appelée « rhum ». Cette réglementation n’est cependant pas effective au Québec.

Les différents types de rhum
Les rhums blancs
Qu’ils soient distillés à base de jus de canne à sucre ou de mélasse, les rhums blancs titrent généralement entre 40 et 45 % et sont fruités et végétaux. Ils sont le plus souvent consommés en cocktails. Parmi eux, notons les très populaires mojito, daiquiri et ti’ punch.
Les rhums ambrés
Les rhums ambrés ont souvent passé quelques mois dans des fûts de chêne. Dû au manque de réglementation dans de nombreuses régions du monde, leur couleur peut aussi être ajustée par l’ajout de caramel.
Les rhums âgés ou vieillis
On parle généralement de rhums ayant reposé en fûts de chêne au moins un an. Comme avec le cognac, certains pays identifient le temps de repos de leurs rhums grâce aux mentions very old (VO), very superior old pale (VSOP) ou encore extra old (XO). On trouve aussi des rhums vieillis issus d’assemblage. Dans ce cas, c’est l’âge du rhum le plus jeune du mélange qui doit figurer sur la bouteille. S’ils peuvent être ajoutés aux cocktails, comme le Mai Tai, ces rhums sont aussi dégustés tels quels.
Les rhums overproof
Majoritairement utilisés dans les cocktails, les rhums overproof titrent jusqu’à 70 % d’alcool. Ils sont très utiles dans l’élaboration de punchs fruités.
Les rhums épicés et bruns
Ces rhums sont le résultat de la macération de différentes épices et d’aromates dans du rhum blanc ou ambré. Leur couleur est souvent ajustée grâce à l’ajout de sucre ou de caramel.
Les rhums arrangés
Très populaires en Guadeloupe et en Martinique, les rhums arrangés sont des rhums agricoles aromatisés naturellement dans lesquels on a fait macérer différents fruits tropicaux.

Les rhums au Québec
La production de rhum au Québec reste quelque chose de très nouveau. Même si le rhum n’est pas lié à notre terroir, quelques producteurs audacieux se sont lancés dans la production de produits réussis, en important bien sûr la matière première.
C’est le cas notamment de la Distillerie de Québec avec son rhum d’assemblage St-Roc Fondation. La distillerie Mitis a aussi produit le rhum Nordique, entièrement fermenté, distillé et vieilli sur place. Du côté de la Distillerie de Montréal, on produit différents rhums intéressants, dont deux rhums épicés, un rhum blanc ainsi qu’un rhum infusé aux ananas du Costa Rica, le Rosemont Ananas. L’exploration ne fait que commencer dans la jeune industrie des spiritueux au Québec!